Friday, February 21, 2014

Vendredi ou les limbes du Muezzin



Mise en contexte de l’article: nuit blanche, orage et insomnie. D’où le ton légèrement impatient. Désolée pour ça. Avec du recul, on en rigole. Vous me direz ce que vous en pensez avec la vidéo. 

Vendredi, ou le jour où tu ne peux pas échapper aux muezzins. Ca commence à 4h, doucement et tranquillement. De toutes parts de la ville émanent des ululements vaporeux, qui s’intensifient au fur et à mesure que toutes les mosquées de la ville s’éveillent. Alors à ce moment précis, on pourrait presque croire que l’atmosphère est tout entièrement saturée d’un souffle mystérieux et mystique.  C’est assez saisissant comme expérience. Un peu transcendant si on est de bonne humeur. Imaginez en plus de cela une ambiance un peu mystérieuse avec le léger brouillard de l’aube, la lueur sombre, orangée à cause de la pollution, à travers laquelle on distingue la cime des arbres noirs et quelques lumières d’immeubles. Sans cesser, ça accompagne le levé du soleil puis le réveil de la ville toute entière. Tout ça, on s’y fait doucement, on finit par ne plus se réveiller toutes les deux heures, voire même, on commence à en être bercé.

Toute la journée, différents styles s’enchainent. Des chants, des sermons, des enfants aux voix pré pubères qui s’essayent au microphone.

Par contre, A midi, sans exagérer, on oscille entre rire jaune et arrachage de cheveux. Je n’avais pas connu ça il y a deux ans, mais là… j’ai découvert des muezzins complètement excités. Imaginez un commentateur  de foot EXALTE mais avec des intonations de propagande Nazie (pardon pour la comparaison, mais franchement dur de pas passer par là…) Un peu comme si Patrick Timsit (
dans un Indien dans la ville, on est mal on est mal) s’en prenait personnellement à vous du haut d’un minaret. Ce qui est particulièrement étrange, c’est que toute la ville succombe à l’omniscience de ces réprimandassions. Absolument impossible de s’en couper, même mon casque, volume au max avec Bon Iver, Olafur Arnald et Ludovico Einaudi pour rester Zen, ne couvre pas les « appels à la prière » (ou les engueulades, difficile à dire à ce stade)…  L’air en est tout entièrement saturé, presque comme si ça grondait du ciel. Alors même si je ne comprends rien à ses exaltations, je ne peux pas m’empêcher de me sentir pointée du doigt et de réfléchir à mes pêchers comme si ce muezzin ne s’en prenait directement à moi. 

A ce moment là, en bonne française, je ne peux pas m’empêcher de réfléchir à la laïcité de l’espace public et au respect de la pluralité des cultes… tout ça semble légèrement extra-terrestre dans ce contexte. 

Mettre le volume bien fort



(j'aurai adoré vous offrir une vidéo de meilleur qualité. Bientôt  Bientôt j'aurai un appareil photo digne de ce nom.)


Thursday, February 20, 2014

Supersonic Ojek crush

Bon.
 Je m'y prend n'importe comment. J'ai mille choses à raconter mais évidemment, je vais vous parler d'un truc complètement aléatoire et qui plus est: en anglais. C'est venu comme ça en rentrant de ma ballade en mobylette, et les mots tombaient mieux en Anglais. (Pardon Missie et Alain)

Just had SUCH a wonderful evening, wizzing around the small and broken down streets covered with tangled-up trees, zigzagging across the stuck up 4X4 (so long hummers). It felt warm and homy, chatting along in such an approximate Bahasa, learning that the ojek ( moped public transport) driver used to work in a restaurant, discussing about our experiences as waiters (He kept using his hand to speak, you know, the “Italian” gesture when you put your fingers together and brew thin air. He also also seemed like the kind of person keen for an eye contact when chatting, which made the driving a little more intense. We discussed places to visit, Indonesia’s language varieties, marriage and the difference between Indonesians and Europeans in terms of having children and at what age and more stuff. The Italian gesture puncturing every detail. Total heart crumble for this spontaneous exchange.

I’ve got to a point where I read my indonesian methodology and answer to mails on the ojek. It all feels very good. Having the wind blowing and pumping up my blouse, checking out all these shops, trying to remember good places to go to for this and that.  1$dvds, plates and stuff for a FUTURE HOME, woodcarving workshops, durian and jackfruit showcases, cool food or even just good creambath spots, all lined up in this chaotic and almost informal way).

You end-up exchanging thousands of kid-like smiles with your neighbor drivers; you nod with a smile to shop owners who all nod back happily. You witness funny scenes like this kid staring up at a guy preparing his drink like it was Disneyland in a cup, or this guy crouching in the middle of the avenue, and you never understand why; these male heads all poking through this fake building façade, smoking and looking down on the street… twice that I pass them, and both times I never really got what the hell they were doing there, looking so chilled and cozy. Passing all those inflated cats looking stoned and uninterested in the human race. There are kites flying super high above the tin roof houses, hard to believe there are kids hidden in the narrow streets flying them.

Taxis will never do the job again after such an awesome feeling. Not for anything in the world would I get trapped in those ambulant freezers.

Taxis are just deadly boring

(oui effectivement, je suis en rade d'appareil photo. Je tâche de remédier à cela prestement!)




Friday, February 7, 2014

THE RETURN OF THE PADAWAN

Si le jamais-deux-sans-trois existe c'est bien parce qu'un  jamais-un-sans-deux précède.

Il y a deux ans, mes collègues de Yayasan Tambuhak Sinta, m'avaient prévenu "si tu bois l'eau des rivières, l'esprit de Kalimantan s’empare de toi et t'amènera forcement à revenir". Inévitablement, j'ai bu la tasse quelques fois. Qui eut cru que les choses se mettraient en place si tôt et si radicalement inévitablement? Certainement pas moi. J'ai eu comme le sentiment que toutes les pierres se sont placées une à une, toutes seules, sans que je n'ai à fournir le moindre effort, pour former le pont entre Toulouse et Jakarta. Appelez cela la chance, le hasard, le destin, l’envoûtement Dayak, ce que que vous voulez. Quoi qu'il en soit: c'est efficace.


Grace à mon voyage de 2011,  je commence à  distinguer les contours de certaines régularités ressenties avant chacun de mes deux départs... j'ai eu la nette impression de nager dans le tiraillement de l'instant présent déboussolant et de l'avenir impalpable.  Les au-revoir déchirants et jamais suffisants, les innombrables tâches qui me font perdre le Nord à force de psychoter sur les potentiels oublis... J'ai alors tendance à me mettre en mode veille, instinct de protection face à tout ce qui me rend à la fois trop triste et trop heureuse et sur quoi je n'ai pas d'emprise. Les 23 heures de trajet pour aller de Toulouse à Jakarta n'aident pas... rien de tel qu'un vol interminable seule, hublots fermés, pénombre bleutée H24 pour se noyer dans une apesanteur spatio-temporelle et émotionnelle. Je me sentais un peu aliénée jusqu'à ce que je prenne ma première bouffée d'air Indonésienne. 
Je plonge dans une atmosphère dense ou se distinguent clairement les parfums de mousse, de kretek, de terre humide et chaude, comme si la pluie venait de passer. Là je me réveille illico happée par la claque des souvenirs.

Petite mise en bouche des transports folklo avec un petit tour en taxi avec un gentil monsieur qui clairement n'avait aucune idée d'ou on allait mais n'avait pas envie de me mettre mal à l'aise en l'avouant. Après  avoir fait plusieurs allez-retours et pauses pour demander à tous les passants (parce que oui, à une heure du matin, les étroites ruelles de Jakarta grouillent encore de passants.) on trouve bon port. La maison est immense et recouverte de verdure. je suis accueillie par une collègue rayonnante et enjouée. Je me sens engourdie et littéralement à coté de la plaque mais elle me secoue en m’entraînant voir la vue depuis le balcon... je n'en crois pas mes yeux. On est en plein Jakarta et il me semble être plongée en plein coeur de Bornéo: La maison supplante une rivière boueuse et bien agitée (inondations récentes), flanquée non pas d'immeubles mais de ce qui ressemble bien à un morceau de jungle. On se s'entend plus tant les grenouilles s'égosillent. Des bruits intrigants sur le toit annoncent la présence de mammifères de taille non négligeable. En bas, sous le balcon s'étend une piscine "ecofriendly" remplie de poissons... tout ça sent à la fois la vie qui grouille et le calme absolut. Je ne pouvais pas rêver mieux...


La chose la plus importante à avancer: J'ai trouvé un stage absolument dingue et idéal. Du moins pour moi. Forest People Programme, c'est un concentré survitaminé de personnes engagées dans la protection des minorités vivant dans et des forêts un peu partout dans le monde; Des gens qui respirent le génie et  l'humanité et qui débordent d'énergie positive. Je suis assez intimidée par qui ils sont et par ce qu'ils entreprennent: avec une poignée de contributeurs, ils publient une tonne de rapports sur les droits des minorités, sur l'état des responsabilités sociales et environnementales d'entreprises (surtout celles produisant de l'huile de palme), organisent des formations pour booster l'application des droits indigènes et tiennent des colloques, des tables rondes pour rassembler les acteurs locaux et internationaux pour faire avancer le Schmilblick. Leur objectif principal: Assurer l'autodétermination des minorités, assurer la reconnaissance et la mise en oeuvre de leurs droits tant auprès des entreprises que des gouvernements.  Et ce n'est pas de la tarte.

Clairement ça demande une patience inépuisable, beaucoup d'énergie et une foi d'acier en leur objectif. Ils disent faire partie du "movement", une mouvance altruiste, activiste, globale qui réunirait tous les acteurs engagés pour un monde plus juste et plus respectueux des minorités. Adopteeez moiiii s'il vous plaiiiit.


Il me reste plus qu'à maîtriser l'indonésien couramment, éplucher scrupuleusement tous les rapports qu'on m'a mis entre les mains, me donner un max au travail, trouver un ptit appart à moi, et profiter à fond.
Donc en gros, 5 mois qui s'annoncent plutôt pas mal du tout. 




Petite "mindblowing" et "breath-taking" vue de la maison on je loge temporairement.

Subḥana'llāh